L’œil de la recherche économique de BNP Paribas
Toujours plus d’épargne et moins d’achats automobiles pour les ménages
Les ménages européens épargnent, beaucoup. Certes moins qu’en 2020 où, confinés, leurs dépenses en transport, restauration ou loisirs avaient mécaniquement diminué. Mais toujours nettement plus qu’en 2019, avec un taux d’épargne de près de 3 points au-dessus de celui de l’époque. Le pouvoir d’achat, sujet de préoccupation au plus fort de l’épisode inflationniste, rebondit désormais que celle-ci reflue. Toutefois, non seulement les ménages ne consomment pas ou peu, pour le moment, ce supplément de revenu disponible, mais ils ne l’investissent pas non plus dans leur logement (transactions dans l’ancien et construction neuve en berne). Ce supplément de revenu part donc principalement dans l’épargne financière des ménages : cette dernière et l’investissement représentent ainsi, chacun, près de la moitié de l’épargne totale des ménages, tant en France qu’en Allemagne. Concernant l’épargne financière, il s’agit d’une proportion totalement inédite (hors période de confinement). L’épargne est un moyen de financement, elle peut donc être vue comme préparant l’avenir (verre à moitié plein). Toutefois, on peut aussi l’interpréter comme le report d’une dépense (verre à moitié vide). On peut même pousser jusqu’à considérer qu’une partie de cet effort d’économie soit structurelle, notamment s’agissant du reflux depuis 5 ans de la part du revenu disponible consacrée à toutes les formes d’achats de biens : alimentaire, énergie, non-alimentaire (textile, DPH), biens d’équipement et moyens de transport (dont l’automobile). Une partie de ces économies (près du tiers en France) s’est transformée en consommation de services (en partie substituable à celle de biens, par ex. la restauration à l’achat en magasin), mais la majeure partie de l’économie réalisée est allée grossir les rangs de l’épargne. Une attitude qui devrait se perpétuer selon les dernières enquêtes de conjoncture réalisées auprès des ménages : l’essentiel des économies effectuées sera donc pérenne. Si la baisse des taux d’intérêt, qui va aller en se renforçant, devrait inciter les ménages à dépenser un peu plus, leur taux d’épargne devrait rester fin 2025 encore près de 2 points au-dessus de son niveau de 2019, limitant ainsi les perspectives de rebond de la demande.
Stéphane Colliac