Le consommato-scepticisme des européens
UNE CONSOMMATION VRAIMENT MAL VUE
Si les Européens ont une sombre vision du monde, ils portent sur la consommation un regard qui l’est tout autant. Dans leur esprit, elle est associée à une liste de vocables qui s’inscrivent tous dans une rhétorique négative (Fig. 14). Matérialiste, superficielle, manipulatrice, individualiste, influencée… tel est le quintet choisi par les Européens pour la désigner en priorité. Elle est ensuite vue comme injuste et dangereuse. Ce rejet est partagé dans l’ensemble des pays. Sans trop de surprise, les seniors se montrent les plus acerbes pour désigner une consommation qui, avec le temps, aurait mal tourné. Le premier terme positif, responsable, intervient seulement en 8e position.
FIG. 14 :
QUAND LE CONSOMMATEUR PLAIDE COUPABLE…
La conscientisation environnementale a pour effet une plus ou moins mauvaise conscience des Européens, eu égard à leurs comportements de consommateurs (Fig. 15).
L’achat de produits emballés dans du plastique arrive ainsi en tête de liste (52 %), suivi par le non-tri des déchets (42 %) et le fait de rouler dans une voiture diesel (36 %). Trois actions qui démontrent l’efficacité des campagnes de communication ciblées sur des problématiques environnementales précises.
Les grandes surfaces ne sont plus aux yeux de tous les temples bénis de la consommation qu’elles étaient autrefois (35 %), validant la remise en cause de ce modèle économique entamée par de nombreuses enseignes.
Et manger de la viande provoque également un rejet significatif (35 %). En revanche, prendre l’avion n’assombrit pas encore vraiment les consciences, confirmation que les vacances et les loisirs gardent les faveurs consuméristes des Européens (21 %).
FIG. 15 :
FIG. 16 :
Tendance activiste
Le flygskam, ou la « honte de prendre l’avion », est un phénomène en voie de décollage. Venu de Suède, il commence à se répandre en Europe et aux États-Unis.
Ce choix de privilégier tous les moyens de transports autres que l’avion a une incidence directe sur le marché aérien suédois : -6 % sur le trafic intérieur, -2 % sur les vols internationaux.
Si ce phénomène venait à prendre de l’ampleur, les prévisions du trafic mondial s’en trouveraient significativement affectées.
DES CONSOMMATEURS QUI DÉPENSENT MOINS
Cette vision d’une consommation porteuse de valeurs négatives se traduit dans l’envie même des Européens à vouloir dépenser (Fig. 17). 42 % d’entre eux estiment moins consommer qu’il y a 3 ans, seulement 17 % estimant effectuer plus d’achats. Italiens, Portugais et Suédois sont les plus nombreux à avoir le sentiment de moins consommer, alors que les Polonais et les Roumains pensent le plus consommer d’avantage.
Au plan générationnel, les seniors sont significativement plus nombreux que les millennials à avoir réduit leurs dépenses (47 % vs 37 %).
FIG. 17 :
MOINS DE MOYENS, MOINS DE BESOINS
Les raisons de cette moindre consommation sont souvent économiques, particulièrement pour les seniors.
Elles font aussi apparaître un niveau d’équipements satisfaisant et des besoins en recul (Fig. 18). Les pays du Sud, et ceux d’Europe de l’Est mettent en avant les premières, tandis que les pays du Nord distinguent les secondes.
FIG. 18 :
Tendance activiste
Phénomène inédit, les ventes (ou la demande) de Produits de Grande Consommation (PGC) ont connu en Europe une croissance en volume nulle (source Nielsen).
Alors que celle-ci était légèrement positive en Espagne et en Italie (+1,3 %), elle était négative en Allemagne, au Royaume-Uni et en France (-0,5 %, -0,4 %, -0,3 %).
Au plan mondial, leur croissance était seulement de 2 %, soit deux fois moins que la croissance économique mondiale.
DES HÉSITATIONS POUR L’AVENIR
Pour les années à venir, les Européens se montrent plus hésitants quant à diminuer leur consommation (Fig. 19).
6 sur 10 s’attendent à ne consommer ni plus ni moins.
Seulement 1 sur 10 souhaite accroître sa consommation, alors que 3 sur 10 envisagent une réduction des dépenses.
Dans tous les pays, l’incertitude concernant une consommation plus ou moins élevée est supérieure à la moyenne.
FIG. 19 :