Utiliser sa voiture : des coûts démultipliés
Si le prix d’un véhicule est perçu comme relativement raisonnable, il en va très différemment au sujet de son coût d’utilisation. Avec des différences marquées, d’un poste de dépense à l’autre.
Globalement cher
Un budget conséquent
Une majorité des automobilistes est formelle, le budget global d’un véhicule est élevé s’il se réfère aux moyens dont ils disposent. 6 sur 10 partagent ce point de vue. Ils sont minoritaires dans seulement trois pays, avec les Chinois pour être les moins nombreux à pointer la cherté automobile. À l’inverse, les Turcs, pour les raisons que nous avons précédemment évoquées, mais aussi les Brésiliens, dénoncent très majoritairement ce budget élevé (Fig. 12).
Si l’on s’en tient aux strictes données monétaires, c’est aux États-Unis, en Autriche et en Norvège que le poste automobile est en valeur à son plus haut niveau, à près de 2 000 € annuels (Fig. 13). Mais si l’on se réfère au revenu annuel net par habitant, le poids budgétaire de l’usage automobile (carburant, entretien et assurance) devient très différent. Les Américains sont alors ceux qui y consacrent le moins d’argent (6,4 % de leur budget annuel). Un chiffre deux fois plus élevé chez leurs voisins Mexicains (13,3 %). En France, 7,7 % du budget sont consacrés à l’automobile.
Un poids financier de plus en plus élevé
Non seulement une voiture coûte cher à l’usage, mais elle coûte surtout de plus en plus cher. Plus de 8 personnes interrogées sur 10 le pensent, une infime minorité estimant que le coût à l’usage a baissé. Dans tous les pays de l’étude, ce sentiment d’un usage toujours plus cher est majoritaire (Fig. 14). Fort logiquement, toujours en regard de la situation économique qu’ils connaissent, les Turcs plébiscitent cette opinion (95 %). Les Africains du Sud sont presque autant à y souscrire. Il faut se rendre en Asie, plus précisément au Japon et en Chine, pour rencontrer des automobilistes relativement plus « indulgents », un peu moins de 7 sur 10 constatant le renchérissement automobile.
Dépréciation, un coût à l’usage masqué
Une autre façon de considérer le budget automobile consiste à intégrer non seulement les coûts mais aussi les pertes induites. Ainsi, sous cet angle, à l’échelle des pays européens, la dépréciation d’un véhicule apparaît comme le premier poste qui pénalise ce budget, privant les automobilistes d’une marge de manœuvre financière lors d’un futur rachat. Une dépréciation plus forte pour les plus récents modèles électriques, conformément à l’obsolescence accrue des produits technologiques innovants (Fig. 15).
Un coût qui fait renoncer
De façon générale, la problématique coût concerne la mobilité dans son ensemble. Près de 6 personnes sur 10 déclarent avoir renoncé à se déplacer en raison du coût induit, quel que soit le moyen utilisé (Fig. 16). Dans les pays aux économies les plus fragiles, comme la Turquie ou l’Afrique du Sud, cette proportion atteint même près de 8 personnes sur 10. À ce sujet, la France se situe dans la moyenne générale.
Assurance et entretien, deux postes jugés encore raisonnables
L’assurance d’un coût élevé
Premier poste de dépense à l’usage étudié dans cet Observatoire Cetelem 2023 de l’automobile, l’assurance est jugée élevée par près d’1 personne sur 2 (Fig. 17). Au risque de se répéter – et ceci arrivera à nouveau plusieurs fois – les Turcs sont les plus enclins à pointer ce coût excessif (71 %) tandis que les Allemands sont les moins nombreux à en faire état (38 %). La répartition géographique des opinions fait à ce sujet apparaître plusieurs pays européens où les contempteurs de l’assurance s’expriment majoritairement. C’est le cas notamment en Belgique et en Norvège. Un peu plus d’1 Français sur 2 pense de même.
Pour autant, il n’existe pas de réelle corrélation entre le coût de l’assurance et le sentiment de la payer trop cher. Avec près de 1 000 € annuels, les Autrichiens y consacrent le budget le plus élevé alors qu’ils sont parmi les moins nombreux à le considérer excessif. A contrario, les Polonais font partie du groupe de tête des vindicatifs tandis qu’ils s’acquittent du plus faible coût d’assurance. Une fois encore, la France se situe dans la moyenne avec 579 € dépensés annuellement (Fig. 18).
Rapporté au revenu par habitant, le budget assurance place les Autrichiens en deuxième position, devancés de peu par les Mexicains (respectivement 2,5 % et 2,8 %). Les Polonais restent en dernière position de ce classement (1,1 %).
Vers une inversion de la tendance haussière de l’assurance automobile ?
Après 6 années consécutives d’augmentation, les primes d’assurance automobile marquent un léger repli en France en 2021 en faisant économiser en moyenne 9 euros aux automobilistes par rapport à l’année précédente (Fig. 19).
Alors que l’augmentation constante observée depuis 2016 s’expliquait principalement par le renchérissement des pièces de rechange et la répercussion des surcoûts liés aux autres branches de l’assurance (conséquences directes ou indirectes des catastrophes naturelles, Covid…), la raison du recul observé en 2021 est tout autre. En effet, la crise sanitaire, les restrictions de déplacement associées et le déploiement massif du télétravail ont contribué à réduire significativement le trafic et par ricochet les sinistres et les remboursements effectués par les assureurs. À cela s’ajoute l’augmentation de la pression concurrentielle dans le secteur de l’assurance automobile avec l’arrivée de nouveaux entrants qui réduisent les prix grâce à de nouveaux modèles « pay as you drive » ou « pay how you drive » où les tarifs dépendent de l’intensité d’usage de la voiture ou de la façon de conduire.
Réparations, un moindre mal
En matière d’entretien et de réparations, deuxième poste budgétaire étudié, les opinions des automobilistes s’adoucissent, seulement un peu plus de 4 sur 10 les jugeant trop élevées (Fig. 20). À nouveau, les Turcs occupent le haut du classement (72 %) suivis cette fois par des Japonais également très remontés au sujet de leur prix excessif. Les Américains et les Britanniques ne semblent pas devoir en subir les conséquences financières (30 % et 34 %). Et les Français ? Dans la moyenne, bien sûr.
Si l’on en juge par le coût de ces réparations et le pourcentage qu’elles représentent par rapport au revenu moyen, les Japonais semblent avoir de bonnes raisons de se montrer agacés. Avec 901 € dépensés chaque année, ils occupent nettement la première place du classement, suivis par les Norvégiens et les Autrichiens. Une fois encore, les Polonais sont les moins dépensiers (326 €) avec les Turcs pour consacrer aux réparations un budget quasi similaire (Fig. 21).
Concernant le ratio réparations/revenu, les Japonais arrivent en deuxième position, les Mexicains se plaçant à nouveau en tête d’affiche (respectivement 2,7 % et 3,1 %). Pas de changement pour les deux dernières positions occupées par la Pologne et les États-Unis.
Notons aussi que pour les véhicules neufs ou d’occasion, les dépenses consacrées aux réparations sont très proches. Concernant les premiers, elles font l’objet de rendez-vous réguliers en concession engendrant un coût certain alors que pour les seconds, les réparations sont peut-être plus fréquentes, mais effectuées à moindre prix.
Flambées des prix sur les pièces détachées
Les voitures ne sont pas les seules à devenir plus chères d’année en année, les pièces de rechange aussi ! Plusieurs phénomènes concomitants expliquent cette augmentation de près de 30 % en dix ans (Fig. 22).
Les véhicules sont mieux équipés et les pièces de plus en plus sophistiquées et complexes à produire. Les récentes pénuries (de puces électroniques notamment), l’allongement des délais de livraison et l’augmentation du prix des matières premières tendent à expliquer l’accélération récente de l’augmentation des prix. Le monopole des constructeurs automobiles sur les pièces détachées est également régulièrement pointé du doigt pour entraîner des surcoûts importants pour les consommateurs. La libéralisation du marché des pièces automobiles initiée par la loi « Climat et Résilience » du 22 août 2021 pourrait contribuer à inverser la tendance (en France). Cette bascule risque d’être lente et progressive puisque seul le marché du vitrage sera concerné à partir de janvier 2023. Dans l’attente, pour alléger la facture, les consommateurs peuvent compter sur leur garagiste qui, depuis 2017, a l’obligation de présenter un devis alternatif avec des pièces dites de réemploi issues de seconde main et donc moins chères.
L’essence du problème
Mon cher carburant…
Si le coût de l’assurance et des réparations fait l’objet d’un débat relatif, il n’en est pas de même au sujet du carburant. La sentence est claire : 7 automobilistes sur 10 trouvent élevé le budget qui lui est consacré (Fig. 23). Dans un seul des pays de l’étude, en l’occurrence la Chine, ce point de vue ne convainc pas la majorité, mais de façon modérée puisque 49 % des automobilistes chinois s’accordent à le penser. Partout ailleurs, il n’y a pas débat, particulièrement en Turquie où 9 personnes sur 10 constatent cette cherté. Le Japon et le Mexique font preuve d’un peu plus de retenue sans pourtant atteindre la mansuétude chinoise.
Une hausse spectaculaire des prix
L’examen de l’évolution des prix à la pompe dans quelques pays de cette étude, centré sur le seul gazole, permet d’expliquer pour partie le ressenti des automobilistes (Fig. 24).
Au Japon, on constate en effet que l’augmentation des prix est relativement contenue. À l’inverse,
aux États-Unis ou au Mexique, les prix ont augmenté de plus de 50 %, faisant oublier aux consommateurs qu’ils restent cependant bas par rapport à ceux d’autres pays.
Cette augmentation a une incidence directe sur le nombre de kilomètres parcourus. Dans le cas français, il en résulte qu’1 € en plus par litre de diesel conduit à court terme à 1 000 kilomètres parcourus en moins, chaque année. Sur le long terme, cette augmentation tarifaire diminue le kilométrage moyen annuel de 7 500 kilomètres.
Impacts variables du passage à la pompe
Concrètement, le poids de ce budget carburant pèse en moyenne 133 € par mois pour les 18 pays de cet Observatoire Cetelem 2023 de l’Automobile. Avec des écarts sensibles, pas toujours là où on pouvait s’y attendre, la flambée des prix n’ayant pas été uniforme dans tous les pays (Fig. 25).
C’est au Japon que les automobilistes, relativement bienveillants quant à l’impact du budget carburant, estiment avoir la dépense mensuelle la moins élevée : 92 €. Partout ailleurs, la barre des 100 € est franchie, parfois même allègrement. En Belgique et aux États-Unis, duo leader de ce classement, il convient de débourser 165 € par mois pour circuler. Dans la plupart des pays de l’Union européenne, hormis le Portugal et la Pologne, le budget carburant mensuel est assez proche.
Cours du pétrole sous tension
Le 24 février 2022, jour où Vladimir Poutine annonçait le début d’une « opération spéciale » en Ukraine, le cours du baril de pétrole dépassait les 100 $ pour la première fois depuis 7 ans. Après des années où celui-ci a été contenu sous la barre des 80 $, une période très incertaine semble s’ouvrir, le cocktail géo-politico-économique pouvant réserver de multiples surprises (Fig. 26).