Le pouvoir aux pouvoirs publics
Une prise de conscience internationale
En l’état actuel, les politiques publiques ne sont pas toujours clairement perçues mais résolument attendues par 70 % des personnes interrogées dans le cadre de cette étude.
Des programmes en faveur du véhicule électrique existent pourtant à différentes échelles. Au niveau européen, les normes Euro imposent aux constructeurs de réduire les émissions de polluants du « réservoir à la roue », ce qui de fait favorise le VE. À l’échelle nationale, la majorité des pays encourage également le développement du VE à travers des mesures à la fois coercitives et incitatives. Les mises à la route des véhicules les plus polluants sont découragées par des taxes et des quotas limitatifs tandis que les immatriculations des véhicules vertueux comme le VE sont soutenues par diverses formes de subventions.
Aider financièrement la transition
Les principales mesures de soutien se concentrent autour de primes et de subventions pour réduire l’écart de coût persistant entre les VE et leur équivalent thermique. Des programmes d’appui au financement de l’infrastructure des bornes de recharge et à la mise en place de systèmes d’électro-automobilité publique et partagée sont également nécessaires.
Aujourd’hui, l’essor du véhicule électrique ne peut se faire sans incitations financières fortes et durables. Des appuis « indirects » comme la gratuité des péages urbains et des parkings, ou des accès aux voies dédiées au bus, sont susceptibles de porter cet élan. En Norvège, les mesures de soutien public ont été multiples et ambitieuses. Les aides publiques ont rendu le VE meilleur marché tandis que les réglementations urbaines lui ont accordé nombre de facilités de parking et de stationnement. Résultat, le VE représente aujourd’hui 21 % du total des ventes. À l’opposé, la suppression ou la diminution trop rapide des subventions avant que le coût d’usage des automobiles électriques soit inférieur à celui des véhicules thermiques conduit à un arrêt de la croissance des ventes. Ce phénomène a par exemple été constaté au Danemark.
Bilan économique comparé du VE
La comparaison du coût total des différentes solutions énergétiques n’est pas chose aisée.
Beaucoup de paramètres sont à prendre en compte : prix d’achat du véhicule (y compris fiscalité), frais d’entretien, dépenses d’usage en carburant ou électricité, dépréciation et valeur de revente sur le marché de l’occasion… Pour un produit encore récent et rare sur le marché comme le VE, la cote et les futures valeurs d’occasion ne peuvent qu’être estimées. La plupart des études comparatives indiquent néanmoins que le coût total, achat et utilisation, des VE est encore supérieur à celui des véhicules thermiques mais qu’il se réduit rapidement. Le Bureau européen des associations de consommateurs conclut qu’entre une Opel Astra à essence et une Nissan LEAF 100 % électrique, le coût total de cette dernière est 8 % plus important en 2015. Cette différence sera ramenée à 4 % en 2020 puis à 1,5 % en 2025, pour ne plus représenter que 0,5 % à l’horizon 2030.
L’évolution des cours du pétrole et de sa fiscalité, et la baisse du prix des batteries, qui comptent pour la moitié du prix de VE, détermineront le rythme exact de la convergence. Évidemment, ces résultats méritent d’être circonstanciés par type d’utilisateurs, notamment selon le kilométrage annuel.
Plus celui-ci est élevé, plus l’automobiliste aura intérêt à supporter un surcoût à l’achat pour ensuite gagner en coût à l’usage.
Pour lisser ces écarts de prix persistant à l’achat et répondre aux incertitudes liées à la valeur résiduelle du VE et de sa batterie, la location en longue durée avec ou sans option d’achat s’impose souvent face à l’achat classique et définitif. L’investissement est lissé dans le temps, les coûts d’entretien sont connus à l’avance et le distributeur assume contractuellement le risque sur la valeur résiduelle du VE.
Le chargement, c’est maintenant
Parce que la batterie du véhicule électrique doit être régulièrement rechargée, disposer d’un accès à un point de recharge constitue un plus. Pour les habitants d’une maison, l’équipement d’un dispositif de charge ne pose aucun problème, avec une recharge de nuit particulièrement facile. Pour les résidents en habitat collectif, il est souhaitable que le parking possède un raccordement au réseau. Si ce n’est pas le cas, le cadre réglementaire pourrait faciliter cette possibilité. Autre solution, la charge sur le lieu de travail. Là encore, une réglementation et une fiscalité adaptée permettront d’accélérer la mise à disposition de points de recharge dans le monde de l’entreprise.
Pour autant, la seule capacité de recharge à domicile ou au travail ne saurait satisfaire tous les besoins et surtout rassurer pleinement les angoissés de la panne. Compte tenu des limites actuelles d’autonomie et l’impossibilité d’échanger des batteries vides contre des batteries pleines, le déploiement d’un réseau de recharge en voirie apparaît nécessaire pour réassurer les hésitants et les automobilistes qui veulent un seul véhicule pour tous types de trajets. Et pas n’importe quelle infrastructure. Idéalement, des bornes de recharge rapides – et donc plus coûteuses – installées notamment sur les autoroutes. Se pose alors un problème du type de « la poule et l’œuf ». Des bornes de recharges seront installées seulement si suffisamment de VE s’y branchent pour les rentabiliser, mais il y aura suffisamment de VE seulement s’il y a assez de bornes en voirie… La puissance publique doit une fois encore intervenir en assurant aux côtés des opérateurs autoroutiers et énergéticiens une partie du risque et du financement des réseaux d’infrastructures. En 2016, le nombre de points d’accès de recharge publics augmentait à la même vitesse que celui du nombre de VE sur les routes. L’immense majorité des VE se rechargeait sur des accès privés.
Favoriser les systèmes d’électro-automobilité
Les experts s’accordent à dire que le VE sera d’autant plus intéressant aux plans économiques et environnementaux qu’il sera utilisé de façon intensive. On pense aux derniers kilomètres des livraisons de marchandises en ville, aux flottes partagées de véhicules d’entreprises ou encore à celles destinées aux services de mobilité partagée (flotte d’autopartage). Ainsi, la coordination et l’articulation des politiques publiques au niveau national et local – villes et pôles urbains – s’avèrent indispensables dans la promotion et le développement du VE. D’une part, la hausse des volumes engendrée par ces offres de VE partagés assurera la baisse des coûts de production des batteries par un effet d’échelle accéléré. D’autre part, elle préparera et habituera l’opinion et les automobilistes pour leurs futurs choix individuels.
Exemples actuels de politiques de soutien au véhicule électrique
Chine |
|
France |
|
Allemagne |
|
Japon |
|
Norvège |
|
Royaume-Uni |
|
États-Unis |
|
Bien plus que protéger l’environnement
Sauver la planète, améliorer l’air des villes, réduire la dépendance au pétrole sans se jeter dans une autre dépendance comme le nucléaire, les enjeux sont nombreux et de première importance pour les gouvernements. Pour autant, le projet de construction d’une filière électrique et la déconstruction d’une autre, celle des véhicules thermiques, prendra du temps et devra être finement piloté. À défaut, l’industrie automobile européenne pourrait, par exemple, pâtir de la baisse de ses débouchés en véhicules thermiques remplacés par des VE importés de Chine… L’Empire du milieu stimule ce marché plus que tout autre pays pour améliorer la qualité de l’air de ses villes, mais également pour imposer son leadership industriel dans ce domaine.