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Partie 2 - Le sans contact au prisme de la crise de la COVID-19

Une réalité sociétale multiple, concrète et marquée géographiquement

8 minutes de lecture
La vie sans contact n’est pas apparue spontanément, les signes de son émergence nous ramenant plusieurs décennies en arrière. Mais force est de constater que la crise sanitaire a accentué à la fois sa présence, ses pratiques et surtout la perception qu’en ont les Européens. Une vie sans contact résolument avérée qui génère des sentiments contrastés, où le positif le dispute au négatif. Une vie sans contact perçue différemment selon trois zones géographiques distinctes.

Si l’on devait lister l’ensemble des applications et des pratiques qui relèvent du sans contact, le résultat réserverait à l’évidence beaucoup de surprises. Car derrière son usage emblématique symbolisé par le paiement, le sans contact est partout présent dans nos vies, parfois d’une discrétion telle qu’il se fait totalement oublier.

40 ans ou presque de sans contact

Télépéage ou parking, clé magnétique, carte de transport ou de cinéma, badge de remontée mécanique, carte de paiement, assistants vocaux… le sans contact s’est depuis longtemps installé dans nos vies, à tel point que nous ne prêtons plus toujours guère attention à sa présence (Fig. 13). Si le premier appel avec un téléphone sans fil a été donné en 1973, c’est dans les années 80 que le premier « outil » sans contact voit le jour. Il s’agit d’un système de télépéage mis en place en Norvège. En 1989, l’Italie étend ce dispositif à l’ensemble de son territoire.

Le sans contact poursuit son parcours toujours dans le domaine des transports. En 1997, les voyageurs de Hong Kong l’utilisent pour circuler dans le réseau de la ville. 1998 marque une date décisive pour l’émancipation de cette technologie. La Corée du Sud voit le premier paiement être effectué à partir d’une carte de paiement sans contact. Il faut attendre 2005 pour qu’une première expérimentation ait lieu en France pendant six mois, dans les magasins de Caen acceptant la carte Cofinoga.

 

Fig. 13 :

 

Le sans contact, acteur majeur du quotidien, symbolisé par la Covid-19

Quand on interroge les Européens, un peu plus d’un an après le déclenchement de la crise sanitaire, l’incarnation du sans contact ne fait pas de doute. Pour près d’1 Européen sur 2, et dans presque tous les pays de l’étude, c’est bien la Covid-19 qui symbolise le mieux cette vie (Fig. 14). Les mesures de confinement, de couvre-feu, de distanciation physique sont passées par là, imposant des échanges de vie qui se comptent au moins en mètres. La gravité de la crise aurait même presque pu faire penser que ce score aurait été plus élevé. Les Portugais et les Italiens sont les plus nombreux à associer Covid-19 et sans contact (62 % et 60 %). Seules trois nations ne la placent pas au premier rang des réponses données : la République tchèque (33 %), la Slovaquie (35 %) et le Royaume-Uni (37 %).

À distance relativement raisonnable, en deuxième position, le paiement sans contact est cité par 37 % des Européens, avec des écarts significatifs d’un pays à l’autre. Italiens et Portugais restent soudés pour en faire très peu cas (13 % et 19 %). Hongrois et Britanniques le désignent comme l’exemple même de la vie sans contact (62 % et 61 %).

Les deux items suivants mettent aussi en évidence l’impact de la crise sanitaire sur la prise en compte du sans contact. Les communications virtuelles et le télétravail recueillent, en effet, 35 % et 33 % des opinions. Deux pratiques, nous y reviendrons, qui se sont particulièrement développées ces derniers mois. Les Autrichiens placent même les communications virtuelles au premier rang de leur classement (49 %). Les Polonais et les Bulgares font de même en ce qui concerne le télétravail (58 % et 53 %).
Autre symbole de la vie sans contact sous Covid-19, le port du masque est mis en avant par 1 Européen sur 4. Les Suédois, auxquels il a été recommandé de le porter seulement le 18 décembre 2020, sont seulement 7 % à en faire état.

Téléphone, télémédecine, applications et domotique recueillent enfin 20 % ou moins des suffrages.

 

Fig. 14 :

 

Une source de sentiments contrastés

Le « poids » du sans contact dans nos vies ne saurait être seulement concret, il est aussi psychologique, comme nous le disent les Européens, faisant naître des sentiments mitigés. 73 % des personnes interrogées associent au moins un terme négatif à la vie sans contact, contre seulement 58 % un terme positif (Fig. 15). Un mot se détache nettement du lot : la solitude. 43 % la place au premier rang, témoignage d’une mise à distance physique qui n’a fait que s’exacerber avec la COVID-19. Dans tous les pays de l’étude, hormis en Hongrie qui opte pour le danger, la solitude est placée en tête du classement, comme en Belgique, au Portugal, en France et en Suède, où plus d’une personne sur deux la mentionne.

 

Fig. 15 :

 

Trois autres sentiments négatifs sont ensuite associés par les Européens à la vie sans contact : tristesse, difficulté et peur (31 %, 23 % et 21 %). La première est ressentie davantage à nouveau au Portugal et en France, mais aussi en Espagne et en Roumanie. L’Italie et la Roumanie expriment la difficulté que la vie sans contact induit. Portugal, Espagne et Hongrie font part de la peur qu’elle provoque.

Pour autant, ce ne sont pas non plus les points de vue positifs qui manquent. 58 % des termes associés à la vie sans contact le sont. Au premier rang vient l’aspect pratique, à hauteur de 20 % des opinions (5e rang, tous termes confondus). Une praticité qui cependant est loin de faire l’unanimité. Pour 32 % des Britanniques et des Bulgares qui la distinguent, seulement 4 % des Portugais en font état.

Vient ensuite un trio composé de la facilité, du progrès et de la liberté (17 %, 16 % et 14 %). Là encore, les disparités sont nombreuses d’un pays à l’autre. Les Polonais jugent facile la vie sans contact (30 %). Les Bulgares le contestent (11 %), les Portugais et les Espagnols également.
Elle est synonyme de progrès pour les Slovaques (25 %) et plus largement au sein des pays de l’Europe centrale. Les Italiens (8 %) ou encore les Portugais et les Suédois (9 %) sont très loin de le penser. Le score enregistré par la liberté qu’elle apporte va quant à lui du simple au double (20 % vs 11 %). (Fig. 16)

 

Fig. 16 :

 

 

43 % des Européens associent le sans contact au mot « solitude ».

 

3 groupes pour 3 vécus du sans contact

Derrière ces résultats, il apparaît de façon sous-jacente une façon de pratiquer et de ressentir la vie sans contact qui tient compte de nombreux facteurs comme la maturité de ses usages, la culture et la puissance économique. Et si on établit une grille de lecture en fonction de ces vecteurs essentiels d’explication, il en ressort trois groupes géographiques dont les membres partagent peu ou prou une même vision de la vie sans contact. Trois groupes qui se révèlent souvent lorsque l’on traite de la consommation.

Le premier groupe rassemble des pays situés au nord de l’Europe ayant en commun une maturité vis-à-vis du sans contact, due à l’antériorité de ses pratiques, conjuguée à une culture anglo-saxonne et une aisance économique. Le Royaume-Uni, la Suède et l’Allemagne en sont les porte-étendards, auxquels il convient d’ajouter l’Autriche.

Le deuxième groupe nous emmène au sud de l’Europe avec des nations latines qui partagent leurs origines méditerranéennes, une dominante catholique et une situation économique parfois plus instable. Le sans contact y est souvent associé à des termes positifs et son antériorité est jugée moindre que dans de nombreux autres pays.

Le troisième groupe rassemble les pays situés à l’est de l’Europe où les opinions sur le sans contact sont plus équilibrées entre positif et négatif. Des pays où les pratiques du sans contact préexistaient mais ont également connu un très rapide développement ces dernières années. Exemple de cette croissance soudaine la Pologne où les transactions sans contact sont passées de 33 % en 2014 pour 80 % en 2018 (source : Étude carte Visa, 2018).

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Alors que le temps a semblé comme suspendu, avec une mise en parenthèse de l’économie, et plus largement de la vie sociale, la perception d’une stabilité du pouvoir d’achat par les Europé
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