Observer, éclairer et décrypter l'évolution des modes
de consommation en France et à l'international
Rechercher

L’implantation des distributeurs de billets en France passée au crible

27
mar
2019

(AFP) – Retirer de l’argent d’un distributeur avant de faire quelques courses au marché: ce geste banal devient-il plus difficile pour les Français qui vivent en dehors des centres urbains? Pour en avoir le cœur net, la Banque de France planche actuellement sur une cartographie de l’accès aux espèces.

Il n’existe aucune contrainte réglementaire concernant l’organisation des réseaux de distributeurs automatiques de billets (DAB): chaque acteur est libre d’installer ou de retirer des machines à sa guise, selon sa stratégie de maillage du territoire.

La Banque de France veille au grain, mais ne peut réellement contraindre les groupes bancaires.

« Si on laisse se faire les stratégies individuelles de tous les acteurs, nous arriverons à des points de rupture importants notamment dans les territoires les plus difficiles à desservir », a averti lors d’une audition devant le Sénat, Erick Lacourrège, directeur général du réseau à la Banque de France.

L’institution a ainsi proposé, en relation avec l’Etat et la Fédération bancaire française (FBF), « de rentrer dans l’élaboration d’une politique nationale des espèces cette année ».

– Cartographie en cours –
« Le dispositif actuel d’accès au cash en France est très efficace », juge de son côté la FBF, qui estime que 99,7% des Français vivent « à moins de 15 kilomètres » d’un accès aux espèces.

La fédération reconnaît que le nombre de DAB décline sur le territoire (54.786 à fin 2018, contre 55.810 un an plus tôt).

Mais ce recul est compensé par la hausse d’autres types de points d’accès aux espèces (Compte Nickel, retrait chez des partenaires du Crédit Agricole, du Crédit Mutuel etc.), passés de 22.500 à 23.323 entre 2017 et 2018.

« On constate que l’accès à l’argent liquide peut être difficile pour certaines catégories de personnes, à certains endroits », commente auprès de l’AFP Olivier Gayraud, juriste à l’association de consommateurs CLCV.

La Banque de France planche actuellement sur une cartographie afin d’établir un diagnostic précis. Verdict dans quelques semaines.

« Il ne s’agit pas de favoriser les espèces plutôt qu’un autre moyen de paiement, mais de garantir qu’il y ait égale accessibilité, égale qualité et égale sécurité de tous les moyens de paiement pour tous les Français », souligne l’institution.

Un DAB « représente un certain coût pour les banques, difficile à rentabiliser quand il est peu utilisé chaque jour », explique à l’AFP Julien Maldonato, associé industrie financière chez Deloitte.

L’implantation d’un distributeur de billets coûte environ 90.000 euros et son entretien annuel autour de 14.000 euros. Le transfert sécurisé des fonds, onéreux dans tout cas de figure, pèse encore plus lourd pour les communes isolées.

– Le liquide a toujours la cote –
« Malgré le développement de nouveaux moyens de paiement, il y a des situations, notamment dans les territoires ruraux, où le liquide est relativement incontournable », estime M. Gayraud.

Pour l’heure, les espèces résistent à la pression du paiement sans contact et par smartphone.

Les Français paient en liquide 68% de leurs achats en magasin, une part inférieure à la moyenne européenne (79%), selon une étude de la Banque centrale européenne.

En valeur, la proportion tombe à 28%, car les espèces sont privilégiées pour les petites dépenses.

« Le point le plus important à notre sens c’est l’idée du choix, d’avoir la possibilité d’utiliser un moyen de paiement gratuit, sécurisé et plus sûr que d’autres outils », souligne auprès de l’AFP Matthieu Robin, chargé de mission sur le secteur financier à l’association UFC-Que Choisir.

« Le +cash+ fiduciaire est un ancien moyen de paiement, qui est voué à très long terme à disparaître dans une société du tout numérisé », estime M. Maldonato. Mais en attendant, « il faut gérer la transition ».

Pour maintenir un accès aux espèces en zone rurale, le gouvernement table notamment sur le « cash-back », le retrait dans un commerce lors d’un achat par carte bancaire.

La pratique, rendue possible par la ratification d’un texte en juillet, est déjà largement répandue en Europe.

Avant cela, certaines banques, notamment le Crédit Agricole et le Crédit Mutuel, ont mis en place des partenariats avec des commerçants afin d’offrir un service de retrait gratuit… mais seulement à leurs clients.

(Crédits photo : petekarici / IStock.com )


+ D'autres articles

Retour en haut de la page

+ Vous pourriez aimer aussi