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En perte de vitesse, les hypermarchés contraints de revoir leur modèle

28
jan
2018

(AFP) – Concurrencés par le commerce en ligne et les magasins spécialisés, à l’exemple de Carrefour, les hypermarchés doivent préserver leur domination dans l’alimentaire et donner plus de place au numérique pour survivre, estiment des experts du secteur.

Face à un essoufflement de son modèle, Carrefour a annoncé mardi la suppression de milliers de postes ainsi qu’un virage vers le commerce en ligne et le bio. Le géant, qui pointait encore à la deuxième place mondiale des distributeurs en 2001, est descendu à la 9e.

Et entre 2015 et 2016, les distributeurs ont vu leurs chiffres d’affaires cumulés diminuer de 1,1% en France.

« Il y a un coup de mou sur le modèle » de l’hypermarché, reconnaît Yves Marin, directeur au sein du cabinet Wavestone. « Les plus exposés sont avant tout les structures de plus de 10.000 m2 », précise-t-il.

En cause notamment: la montée en puissance des géants de commerce en ligne, comme l’américain Amazon ou le chinois Alibaba, en concurrence frontale avec les rayons non-alimentaires des hypermarchés (textile, produits de bricolage, d’automobile, etc.).

– Le non-alimentaire en berne –

« Le secteur non-alimentaire représente 20% des ventes d’un hypermarché et il perd un point par an, c’est ce fondement-là qui est attaqué », souligne M. Marin, alors que les ventes de biens alimentaires se portent « plutôt pas mal ».

« Les hypermarchés réalisent plus de la moitié du chiffre d’affaires des ventes alimentaires en France », ajoute-t-il.

« Mais il n’y a pas que le numérique », fait observer pour sa part Pascale Hébel, du Crédoc (Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie). Car parallèlement à l’explosion des ventes sur internet, les commerces spécialisés se sont multipliés, de plus en plus plébiscités par les consommateurs.

« Les clients n’ont plus envie de faire leurs courses au même endroit. Ils veulent des gens très spécialisés sur le bricolage ou le jardinage », par exemple, poursuit-elle.

De la même manière, selon elle, « il y a une volonté de ne plus aller dans des grandes enseignes pour favoriser les commerces de proximité, notamment pour le lien social ».

Le modèle de l’hyper, né dans les années 1960, ne pouvait pas résister non plus aux tendances sociologiques qui sont apparues ces dernières décennies en France.  

« Ce modèle-là a correspondu un temps aux familles classiques avec enfants, qui étaient un peu plus éparpillées sur le territoire », analyse encore Mme Hébel. Or, aujourd’hui, les nouvelles générations vivent « autrement, beaucoup plus dans les centre-villes » et dans des familles qui ne sont plus construites de la même façon.

– « Phygital » –

Mais la fin de l’hypermarché est un mythe, s’accordent à dire les experts. « Il ne faut pas oublier qu’on est dans le pays qui a inventé la grande distribution », rappelle Jean-Marc Liduena, associé chez Deloitte. « Ils ont toujours une puissance d’attraction incroyable et restent le format roi en France », surenchérit quant à lui Yves Marin.

Pour sortir de l’ornière, l’éventail des options est large. Pour M. Liduena, l’hypermarché doit notamment effectuer sa mue vers le « phygital ».

« C’est une synthèse entre le monde +physique+ du magasin avec tout ce que cela a de bien -on peut toucher les produits, jouer avec les sens- et l’expérience +digitale+, c’est-à-dire que tout doit y être quasiment numérique: à l’accueil, au +drive+ (récupération des courses en automobile, NDLR), à la caisse », affirme-t-il.

« Vous avez aujourd’hui des applications sur votre smartphone qui vous aident à comparer le prix de votre ticket de caisse à d’autres hypermarchés », cite en exemple l’expert.

Sur le terrain technologique, les partenariats avec des acteurs du numérique sont également un moyen d' »accélérer l’apprentissage des hypermarchés », selon lui. Auchan s’est allié à Alibaba, Géant Casino a installé dans ses magasins des coins Cdiscount, etc.

Un recentrage vers l’alimentaire, déjà à l’oeuvre dans de nombreuses enseignes, constitue aussi une nécessité, jugent encore les experts.

« Il faut introduire plus de services alimentaires (…) dans les hypers », comme plus de restauration sur place ou à emporter, conclut Yves Marin.

(Crédits photo : DENIS CHARLET / AFP )

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