Consommer, d’abord et toujours une question de prix
Pendant longtemps, au moins dans l’esprit de celles et ceux étrangers au concept, il était de bon ton de considérer les consommateurs low cost comme faisant profil bas. Le jansénisme décoratif des magasins, le faible périmètre de l’offre produits, le minimalisme des services proposés désignaient le low cost pour les ménages qui n’avaient pas les moyens financiers de faire autrement. O tempora, o mores, aurait pu dire Cicéron. S’il n’est pas (encore ?) résolument tendance de consommer low cost, ceci est désormais largement partagé. Par conviction. Par obligation.
Consommer, d’abord et toujours une question de prix
L’éruption soudaine de l’inflation, à la manière d’un volcan que l’on croyait pour toujours endormi et qui se serait brusquement réveillé, a replacé au centre du débat économique et de la vie quotidienne des consommateurs la question du prix.
LE PRIX AVANT TOUT, SURTOUT POUR LES REVENUS FAIBLES
Lorsqu’on interroge les Européens, le prix est leur principal critère de choix dans l’achat d’un produit, bien davantage que la qualité. 6 sur 10 en moyenne le mettent ainsi en avant (Fig. 15). Pour les Portugais, les Polonais, les Slovaques et les Hongrois, il est particulièrement essentiel (76 %, 74 %, 69 % et 69 %), alors que les Suédois et les Français accordent au prix presque une égale attention qu’à la qualité (52 % et 55 %).
Si la priorité accordée au prix est partagée avec la même intensité par toutes les générations, la segmentation en termes de revenus fait naturellement apparaître une différenciation beaucoup plus nette. 70 % des Européens aux revenus faibles la placent en premier contre seulement 51 % pour les revenus élevés.
PRIX OU QUALITÉ, TOUT DÉPEND DU SECTEUR
Pour autant, cette vision globale et ce critère prix dominant masque un point de vue plus divers quand il s’agit de considérer les différents secteurs de consommation.
Pour certains d’entre eux, la prépondérance du critère prix dans le choix est clairement affirmé.
En matière d’énergie le différentiel entre prix et qualité est de 24 points (55 % vs 31 %) et de 18 points dans le domaine des transports (53 % vs 35 %).
À l’inverse, la recherche de la qualité s’impose clairement lorsqu’il s’agit d’acheter un appareil électroménager (+14 points), un appareil numérique (+11 points) ou un encore un véhicule (+8 points). Des produits aux coûts conséquents, pour lesquels on aurait pu attendre la volonté de payer le moins cher possible, mais dont la solidité, la durabilité et donc la qualité n’en demeurent pas moins essentielles aux yeux des consommateurs. Notons aussi que quel que soit le secteur considéré, la marque ou l’enseigne ne constitue jamais le critère de choix prépondérant.
DANS LES 3 SECTEURS « LABELLISÉS » LOW COST, UN ARBITRAGE MESURÉ
Si nous nous focalisons sur les trois secteurs qui incarnent le low cost, le prix est prioritaire pour deux d’entre eux (transport aérien et habillement), mais dans des proportions mesurées. Ainsi, le différentiel entre prix et qualité sera de 10 points dans l’aérien et de 3 points dans l’habillement. Dans l’alimentaire, la qualité prend le dessus pour 1 point (Fig. 16).
Concernant le transport aérien, seules l’Italie et l’Espagne font le choix de la qualité avant celui du prix, tandis que l’inverse est principalement constaté dans les pays de l’Est de l’Europe.
En matière d’habillement, on retrouve à nouveau l’Italie et l’Espagne pour privilégier la qualité, rejointes par le Royaume-Uni et la Suède. Deux pays de l’Est de l’Europe, la République tchèque et la Slovaquie portent à nouveau au plus haut le critère prix. Question alimentation, six pays font le choix premier de la qualité, avec l’Italie championne toutes catégories à ce sujet. Encore et toujours, l’Est européen regarde d’abord les prix.
L’OPPORTUNITÉ DE CONSOMMER PLUS
Dans ce contexte qui donne au prix un rôle essentiel dans la consommation, le low cost apparaît comme une solution pertinente pour consommer plus. 77 % l’affirment. Un score équivalent à celui enregistré à ce sujet, lors de l’Observatoire Cetelem 2009 de la consommation. Si l’on ajoute que 82 % des consommateurs estiment que le « cousin » hard discount est lui aussi approprié pour atteindre ce but, pas de doute qu’ils identifient clairement le positionnement de ces deux concepts (Fig. 17). Une seule solution semble encore plus efficace : diminuer les dépenses des postes non prioritaires pour gagner ainsi en potentiel d’achat (86 %). À propos de ces trois façons de dégager des manœuvres financières pour dépenser plus, le Portugal et la Roumanie se distinguent nettement des autres pays, alors que la Belgique et la France en font moins état.
UN ATTRAIT MULTI-CRITÈRES
Mais si le low cost séduit par le prix, ce n’est pas là son seul atout pour convaincre les consommateurs de son bien-fondé. C’est un ensemble de facteurs qui le rendent attractif.
Tout autant que dépenser moins et avoir plus de moyens pour acheter davantage de produits, le low cost répond aussi aux attentes, notamment en termes de rapport qualité/prix (26 % vs 25 %). Les Italiens votent majoritairement pour le premier critère, les Portugais pour le second (34 % et 35 %). Autre élément pris en considération, qui échappe cette fois au libre-arbitre, le low cost s’impose aux Européens qui n’ont pas le choix financier de faire autrement, contrainte sur laquelle nous allons plus longuement revenir (16 %). À ce sujet, les pays de l’Est européen s’accordent pour être les plus nombreux à le souligner.
Le low cost est aussi perçu comme une solution appropriée pour diminuer sa consommation ou pour ne pas payer plus cher pour des produits qui se ressemblent, peu importe où on les achète (13 % et 12 %). Il est enfin choisi pour sa facilité d’accès (8 %) (Fig. 18).